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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

Plates. Je leur déclarai que le pays dans lequel j’allais entrer était encore plus dangereux que la région que nous venions de parcourir ensemble, puisqu’il y passait sans cesse des troupes de guerriers Pieds-Noirs, Assiniboins, Gros-Ventres, Arikaras et Sioux, nations qui leur avaient toujours été hostiles ; que je n’osais davantage exposer leurs vies ; que je remettais entre les mains de la Providence le soin de ma conservation, et que, avec l’aide de cette protection divine, je n’avais rien à craindre. Je les exhortai en même temps à continuer à servir le Grand-Esprit avec ferveur ; et réitérant mes promesses d’un prompt retour en compagnie d’autres missionnaires, je les embrassai tous, et leur souhaitai un heureux voyage.

Mon Flamand et moi, nous commençâmes avec courage le trajet solitaire et dangereux de plusieurs centaines de milles que nous avions à parcourir seuls à travers un désert inconnu, où nul chemin n’était tracé, et sans autre guide que la boussole. Longtemps nous suivîmes le cours de la Roche-Jaune, excepté dans quelques endroits, où des chaînes de rochers interceptaient notre marche et nous obligeaient à faire de grands circuits, et à traverser des coteaux rocailleux de quatre à cinq cents pieds d’élévation. À chaque pas, nous apercevions des forts que les partis de guerre construisent pour le temps de leurs courses de meurtre et de pillage ; il s’y trouvait peut-être des ennemis aux aguets à l’heure même que nous y passions.