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autres ! Ne lisez pas un livre de ce siècle ; je n’en connais pas deux qui méritent les regards honnêtes d’un brave jeune homme qui a conservé la piété, la pudeur, les chastes enivrements de ses dix-huit ans.
Allons, point de lâcheté ; revenez à la forte et si vive nourriture, à la discipline, aux enseignements de Port-Royal-des-Champs. Rappelez-vous Pascal, Arnault, Nicole, Racine, Bossuet, Fénelon et Massillon, son frère dans l’art de rendre aimables les sévérités mêmes de l’Évangile. Rappelez-vous les beaux livres du dix-septième siècle et les belles pages du siècle suivant, ou bien remontez dans les critiques de la science chrétienne. Ce seront là des auteurs utiles et sûrs ; ce seront là des études remplies de douces promesses. Ainsi vous arriverez à être un homme, un homme éloquent, austère et dévoué.
Vous avez choisi une belle et sainte profession, belle et sainte entre toutes. Soyez-en digne. Ne rougissez pas de votre habit : avec cet habit-là ont été civilisées les nations modernes. Au contraire, obéissez à votre vocation, marchez bien droit dans votre sentier, la tête haute, et quand, par hasard, vous trouverez que la nuit est épaisse, que le chemin est couvert de ronces et d’épines, que la colonne lumineuse, c’est-à-dire votre conscience, est tournée de son côté nuageux, rappelez-vous ce que dit un ancien livre de philosophie, que je lisais dans ma jeunesse :

Haud facilem voluit Pater ipse colendi
Esse viam, curis acuens mortalia corda.