Page:Piedagnel - Jules Janin, 1877.djvu/72

Cette page a été validée par deux contributeurs.
58
jules janin

d’Évreux[1], recevait, tout ravi, la lettre suivante, en réponse à des éloges enthousiastes qu’il avait adressés au critique des Débats :

Mon cher cousin,
Puisque vous le voulez, je ne demande pas mieux. Que va dire monsieur votre régent s’il vient à savoir que vous vous êtes mis en correspondance avec un faiseur de romans comme moi ? Vous aurez beau lui dire que je ne suis pas aussi noir que j’en ai l’air, vous verrez que l’excellent homme aura bien peur. Quoi ! l’auteur de tant d’œuvres profanes, lui écrire du fond d’un séminaire ! C’est un grand péché peut-être.
Eh bien, non, ce n’est pas un péché, car un écrivain de romans vous donnera les meilleurs conseils, des conseils tout fraternels. Je veux dire que la vie est chose grave et sérieuse, que la jeunesse passe vite, et qu’il la faut employer non pas à admirer des écrivains futiles comme moi, mais à étudier les maîtres de la pensée et de la conscience, les grands orateurs de l’Orient et de l’Occident : saint Augustin et saint Jérôme, saint Grégoire et saint Ambroise, saint Jean Chrysostôme surtout ; Le Maistre et Bossuet. Lisez Bossuet. Voilà un maître ! Voilà un homme qui a créé la langue française ; il appartient à Homère aussi bien qu’à Louis xiv. Lisez-le. Ses sermons sont peut-être les chefs-d’œuvre de
  1. Devenu curé de Tosny, Cet heureux abbé Janin n’était pas le parent de l’éminent écrivain.