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de bien fausses idées sur la puissance anglaise dans l’Inde, comme aussi l’abbé Jouve s’était fait de singulières illusions sur le caractère des Indous. À chaque pas nous commettions, lui et moi, de lourdes bévues qui faillirent parfois nous coûter cher. En Français étourdi, en vrai perroquet libéral, je faisais un emploi fort plaisant des articles du Constitutionnel, traduits en hindoustani. J’avais lu, et c’était vrai, qu’en 1798 le fameux Tipoo-Saëb s’était laissé saluer du titre de citoyen Tipoo, et avait livré ses grandes batailles en déployant un drapeau tricolore. Mais les temps étaient bien changés, et j’arrivais justement le lendemain des derniers combats où venait d’être anéantie la rébellion des Marates. Ces mots de Napoléon et de Liberté, magiques en Europe, faisaient sourire tous les Rajahs. Je poussai la folie jusqu’à me faire présenter au vieux Mogol, qui n’est plus que le très humble pensionnaire du gouvernement britannique, et j’obtins un durbar, c’est-à-dire une audience, où je débitai mon plus bel article sur l’indépendance nationale ; le grand Mogol, pour me prouver sa