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110 LE DBBNIER

passer la nuit. Ce cavalier est de ceux qui , par métier , ménagent leur monture : il escorte en personne quatre coursiers de prix, qu’un palefrenier conduit en laisse ; il ya et vient autour d’eux avec une surveillance jalouse ; inquiet de leur moindre mouvement , il arrange sans cesse les housses qui les protègent imparfait^nent contre les mouches dont leur queue frappe» en vain, le nuage tourbillonnant. C’est un marchand» un courtier de chevaux, un maquignon , comme nous dirions aujourd’hui , et non un chevalier. Arrivé récemment d’Egypte, il chemine par pelites journées depuis Marseille» et se rend à Arles, où il espère trouver des amateurs dignes d’apprécier ses quadrupèdes de pur sang arabe» et dont la généalogie est aussi bien constatée que celle du plus illustre baron. Avec les premières ombres du crépuscule» le marchand entra dans Saint-Remy» et il s’arrêta à la première anberge qu’il trouva sur sa gauche , soit que ce fût la meilleure » soit que ce lût la seule. C’était l’auberge de la Graille , ainsi nommée de la corneille qui lui servait d’enseigne , oiseau loquace comme la pie , et que les mauvais plaisants du pays affectaient quelquefois de prendre pour le blason parlant de maître Espeli » quand ils voulaient dénoncer aux étrangers le caractère de l’hôtelier» un des plus bavards de sa profession. Cette auberge existe encore ; l’enseigne du moins , car la maison a été rebâtie plus d’une fois» ce qui fait que je renonce consciencieusement à la décrire, quoique j’en connaisse tous les recoins» et surtout le jardin » pour y avoir souvent joué dans mon enfance, pour y avoir même reçu mon baptême de franchise. C’est là qu’un jour» ayant grimpé imprudemment sur la margelle du puits» aûn d’atteindre la branche la plus élevée d’un abricotier chargé de fruits encore v^ts, le