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SABBAT

palpitante, la fée qui, de ses ongles aigus, égratigne tout et fait saigner la vie dans le cœur des bouquets.

Vous caresserez, dans leurs cellules, ces saintes diaboliques qui ont si innocemment perverti, au nom des Paradis, les pervenches et les ermitages, et, tout ce qui est excessif et ingénu, comme la danse et le suicide, vous l’aimerez d’amour.

Puis, ô puissances végétales, ô musique récréative, vous serez mes pelouses et mes jets d’eau, dans mes domaines du soir…

Souvenez-vous qu’il n’y a pas que moi qui vous possède, créatures… » —

— Je viens d’entendre trois notes bien singulières. J’ai peur. Est-ce toi qui as ri, sorcière ?

— Si tu as à me le demander, tu es un piètre poète, Bémolus. De même que les paroles de Dieu m’arrivent distinctes, le « Ah ! ah ! ah ! » éternel du Diable ne cesse pas de me poursuivre. Nous nous occuperons mieux de lui, plus tard, bien que j’aie vu poindre, ici, là, et, même, partout, pendant que je te parlais, la corne pensante.

En poésie, vois-tu, Bémolus, il n’est pas possible de ne pas fréquenter le Diable. Osons dire que nous ne sommes pas que des Mages, nous, les poètes. Crions, au nom du Diable, roi des perversités adorables, que nous som-