Page:Picard - Sabbat, 1923.djvu/31

Cette page a été validée par deux contributeurs.
25
SABBAT

sur le plateau droit de la balance ? Sur le gauche — ô épouvante ! — je vois vos mensonges, vos désobéissances, vos tiédeurs, votre gourmandise… »

La sœur des digitales et des scorpions prit, dans sa poche, un quignon un peu sec et le dévora à belles dents.

« La Nouvelle, sortez ! »

Ce mot lui fut souvent répété au couvent et dans la religion qu’il enseignait. Rien de plus naturel. Les sorcières, ce sont des fagots à bûcher, et quand les sorcières ont approché les nonnes et les prêtres, elles comprennent l’antagonisme fondamental qui rend si suspect un bréviaire à une corne et réciproquement.

Malheureusement, les sorcières enfants qui, pleines de candeur, jouent avec les hiboux et le Diable, ne voient, de leurs yeux trop lucides, la plupart des hommes à soutane et des femmes à cornette qu’en épouvante. Dans leur ascendance, sans doute, se promènent pas mal de pénitents noirs, de religieuses-geôlières à l’œil en lucarne de prison, et comment aurais-je accepté, sans crier et bondir, la gent bornée et persécutrice, moi dont l’aïeule maternelle fut cette brune et belle montagnarde, cette sorcière à l’œil vert qui, dans son parc sauvage, récitait des vers de Desbordes-Valmore, la céleste damnée, aux hulottes de minuit ?

Quant aux nonnes de mon adolescence, en