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SABBAT

ment honnête avec moi-même, la frénésie de la tentation, si je n’en avais pas l’adresse. J’en possède, aussi, l’audace : j’ose parler et détruire, et je n’hésite pas devant ces terribles crimes mentaux que l’on commet en poussant la lame froide de sa pensée dans les poitrines haïes.

Étrange duplicité que la mienne ! Je semble avoir le parfum de ma joie alors que j’en ai surtout le venin.

Comme je ris quand je vois des mépris assez naïfs pour s’étaler ! Qui a jamais soupçonné le mien ? Il est absolu comme tout ce qui se cache, a l’orgueil pudique et royal de soi.

Aussi, lorsque j’entends notre faible Musset crier : « Qu’importe le flacon ! » eh bien ! j’ai mon dégoût de démon et je vais faire silence sur la montagne.

Mais ça passe, ces malaises-là, et très rapidement. Ce qui ne nous passe pas, à nous, les charmants Lucifers, c’est notre princière élégance et cette race, cette race qui nous fait l’œil ambigu et le rire doux.

La vie ? Je la gifle avec ma chanson. Les autres ? Je les écarte avec mes ailes. Mes erreurs ? Je les couronne comme les plus précieuses idoles. Aussi, m’avertissent-elles quand je suis sur le point de me tromper encore. Les autres, les autres ont des remords,