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SABBAT

gesse, de la volonté, de la puissance, de l’amour… « Voici, t’ai-je dit, mes royautés : elles n’ont pas cessé de sentir pousser à leur front la couronne démoniaque… Voici mes espérances qui ne se sont jamais lassées de manier la flèche, d’essayer des ailes, de jeter, aux forêts, la feuille nouvelle et de donner, à mon cœur, le roucoulement du printemps.

J’ai tout voulu, t’ai-je murmuré, tout entrepris, et tout réussi, puisque, chaque fois, j’ai désiré complètement. Quand je coulais à fond, je m’accrochais à la divinité de la mer, et je voyais, autour de moi, comme de vertes ou jaunes étoiles errantes, les yeux des poissons maudits scintiller étrangement.

Des démons ! Toujours des démons ! Tout a été pour moi enfer et poésie. L’étincelle fut aussi abondante et souveraine dans mon âme que dans les plus profondes fournaises, et la fourche étoilée, je l’ai portée sur l’épaule comme Jésus la croix.

Que veux-tu faire, t’ai-je crié, à cette destinée mystérieuse et magnifique par la possession qui est la mienne ? J’ai été pure entre les pures et damnée entre les damnées. Je sais ce que je veux dire, et si, pour les poètes, une géhenne existait, son adorable angoisse éternelle, car — entends-tu ? — elle m’aimerait d’amour, elle voudrait la réserver au lis que je suis.

Silence ! Tout est plein d’harmonie, d’équité, de prédestination, et je jure que j’ai toujours souhaité l’alliance du radieux Sa-