Page:Picard - Sabbat, 1923.djvu/201

Cette page a été validée par deux contributeurs.
195
SABBAT

rure, dressés ensemble comme l’échafaud et le couteau, abattus ensemble comme l’arbre et le nid, unis ensemble comme le violon et l’archet, répandus ensemble comme le soleil et le blé d’or, parfaits ensemble comme le divin clair de lune qui donne la même apparence suave et transparente au sapin et au chaume, à la chapelle couverte de lierre et au palais qui est nu avec sa cariatide et sa rose.

Qu’importe, ensuite, l’existence de tous les jours, et les vêtements pitoyables de nos habitudes, de nos préjugés, de nos vices médiocres, de nos peurs imbéciles, de nos égoïsmes mesquins ! Qu’importe ses tares et les miennes ! Nous nous en connaissons — Dieu merci ! — mais nous avons, l’un pour l’autre, la rude estime que la faim a pour le pain et la soif pour la boisson fraîche.

Le reste ? Qu’est-ce que ça nous fait ? Je te jure qu’on peut me dire de lui, le pire. Je l’ai pensé, le pire, de lui. Et après ?

Au-delà de nous, il y a nos enfers et nos roses, nos champs élyséens et nos discours d’ombres heureuses.

Je ne vis, avec lui, que dans ces mondes enchantés, ces récompenses surnaturelles…