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SABBAT

son de perles. Mes cheveux sont plus abandonnés que les algues dans la profondeur aquatique. J’ai péri corps et biens. Les flots m’ont battue, meurtrie, roulée, dans leur force amère, et je suis une épave qui gémit et sourit à son désastre, et la lune éternelle brille sur moi, et les voix de l’océan hurlent encore à mes oreilles, et ses vagues poussées par le trident furieux se brisent toujours sur mes pieds…

— …?…

— C’est entendu ! Mais vraiment a-t-on besoin… de… pour… La volupté, la volupté, qui la connaît ? On lui donne, entre nous, de bien misérables, de bien ridicules moyens, et une zone si limitée, un si piètre climat… En vérité, les pâmoisons de ce monde me font trop rire !

…Et voici qu’il me trouve, qu’il me recueille, qu’il cherche, à mes lèvres, une preuve de vie, qu’il serre, contre son corps qui sent, l’infini et le sel, la victime de son courroux désespéré, de sa fatalité magnifique, de son allégresse déchaînée et terrible, ce dieu marin…

— Bigre !

— C’est ça la possession. Et non… Ah ! Ah ! Ah ! comme je me sens irrévérencieuse en pensant au couple qui fait grand pillage de courtines et d’oreillers, si folle et si pauvre dépense de sueur, de fatigue, de moelle, de mélancolie animale, et — je le déclare ! —