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SABBAT

sur ce cèdre entouré par les faux brillantes des étoiles et plus beau que celui du Liban, je grimpe avec l’aisance d’un singe et d’un inspiré. Possédé par l’Esprit, je vais faire mon sermon :

Sus aux incrédules ! Pourquoi n’avez-vous pas la foi ? Depuis le temps que je gueule : « Ayez la foi ! » vous y mettez de la mauvaise volonté, mécréants, et elle vous coûtera cher. Sus aux tièdes ! Sainte Thérèse qui achète au Diable le petit poignard très espagnol qu’elle plante, parfois, dans le cœur de Dieu, vous en foutra de la tiédeur ! Cette nonne aurait dû épouser Torquemada. L’un au nom de la haine divine, l’autre, au nom du divin amour, auraient fait de l’univers un immense brasier rose dans lequel les hérétiques et les moroses auraient pété comme des marrons. Ah ! mes enfants, quelles réjouissances ! Sus aux scrupuleux ! Le Démon prend, parfois, figure contrite, timorée et délicate, et lorsque, devant la sainte table, les fidèles le voient pleurer dans un mouchoir de quatre sous, ils renoncent à la communion : « Non sum dignus », et le Diable, tout en ne cessant pas de verser des larmes grosses comme des grains de maïs, fait une corne à son mouchoir : « Bonne affaire ! » pense-t-il, et, sa journée gagnée, il va se mêler aux corneilles qui, autour du clocher, mènent un sabbat d’ailes noires.

Ô mes frères, mes frères ! Écouté, en ce jour, par Balthazar le magnifique qui, dans