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LA NUIT DES NONNES

Un… deux… trois… quatre… — Voix de l’éternité que vous êtes grave ! — Cinq… six… sept… huit… — Cloche du couvent comme vous sonnez lentement tandis que, dans une cellule, les nonnes veillent la nonne défunte ! — Neuf… dix… onze… douze… — Ah ! Ah ! Ah ! que la chouette a un beau cri ! Il semble que son hoquet de folle lui est arraché de la gorge par le coup de poignard de la lune.

Sœur sainte Marie-Ange est morte à dix heures, hier soir…

— Je la connus, jadis, dans le couvent où nous étions pensionnaires. Elle avait seize ans, des boucles brunes, des joues veloutées et blanches, le sourire subtil de la musicienne… Elle portait, sur la poitrine, le large ruban vert de l’enfant très sage, et ses yeux aux cils forestiers étaient verts comme son ruban, comme des feuilles printanières et si tentées… Elle s’appelait Marguerite, m’aimait d’amitié pathétique et se perdit par orgueil,