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À tout jamais, tu veux que de moi je m’élève,
Que mon geste, à jamais, soit celui de prier,
Et que je soye, un soir, éclose dans le rêve
Ainsi qu’une fleur blanche au sommet d’un glacier.

Tu me veux un sanglot poignant, profond et sobre,
Tu me veux l’esprit prêt à toutes les ferveurs
Du sacrifice beau comme un soleil d’octobre
Quand l’automne au couchant donne ses yeux rêveurs.

Tu m’as dit : « Que l’amour te soit épreuve et flamme,
Que l’aiguillon te blesse et t’échappe le miel,
Et que ton véhément et tendre cœur de femme
Ait plus d’affliction que l’astre n’a de ciel.

Tu feras des pavots de ta mélancolie,
Tes silences seront aux horizons voués,
Tout bas, tu supplieras la divine Ophélie
Qui versait sur l’amour ses cheveux dénoués.

Accepte de souffrir puisque je te veux telle,
Que ton chemin sera par ta peine embaumé,
Que tu t’épancheras comme une urne immortelle
Sous les yeux immortels qui regardent aimer.