Page:Picard - L Instant eternel.djvu/82

Cette page a été validée par deux contributeurs.


Ô volupté rêvée, ô volupté voulue,
Éloignez-vous de moi, trop chère volupté,
Avec l’oiseau qui part, là-bas, je vous salue,
Emportez avec vous ma dernière beauté.

Ce reste de douceur, de passion, de charmes
Que je gardais encor, les doigts joints sur mon cœur,
Emportez tout… Ne me laissez plus que mes larmes,
Ma nudité, ma chevelure et ma douleur.

Ah ! prenez, prenez tout de ma grâce inutile,
C’est trop poignant, hélas ! quelquefois, d’en avoir,
Et de se regarder, si blanche et si fragile,
Sans que surgisse, enfin, l’homme adoré du soir.

C’est trop, oh ! voyez-vous, d’être vive et légère,
D’avoir un cœur qui sonne avec un bruit d’argent,
Et d’avoir des yeux longs de petite étrangère,
Et du rire subtil, agréable et changeant.

C’est trop de se sentir digne d’être chérie,
Et de faire accourir les Muses sur ses pas,
De se sentir meilleure aux cœurs qu’une patrie
Et bien plus douce au sol qu’une ombre de lilas…