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« Je le veux conscient afin qu’il soit fidèle,
« Pour qu’il soit averti, longtemps, il pleurera,
« Et si je veux, qu’un jour, s’ouvre toute son aile,
« Je veux n’avoir pas peur du vent qui le prendra.

« Oh ! je le ferai beau comme les vastes grèves,
« Parfumé, délectable et vrai comme le pain,
« Je verserai sur lui le baume des grands rêves,
« Et je l’édifierai comme une arche d’airain.

« J’en ferai le vouloir obstiné de ma vie,
« Il sera le logis patiemment orné,
« La route large et nette et, pas à pas, suivie,
« La vigne qu’on émonde et le sol retourné.

« Ah ! seulement, alors, je goûterai ses charmes,
« Je l’aurai, de mes mains, élevé, combattu,
« Il m’aura plus coûté que les pires des larmes,
« Plus que l’orgueil constant et plus que la vertu. »

Je vivais, désormais, de ce haut songe, forte,
Et voici que, soumise à la fatalité,
Parce que vous avez un jour passé ma porte,
À jamais j’ai perdu mon cœur de vérité.