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VAINE SAGESSE


Comme une ruche d’or je croyais mon cœur sage,
Il avait si longtemps chéri le beau devoir,
Et les rêves ailés et le fervent visage
De l’idéal tourné vers l’étoile du soir.

Je transcrivais la vie en un grave et sûr livre,
Je voulais que l’amour fût lent à conquérir,
Je pensais qu’il fallait, avant que de le vivre,
Avoir su longuement à soi-même mourir.

« Oh ! je le frapperai, disais-je, sur l’enclume,
« Il faudra qu’à mes yeux il ne soit pas amer,
« Il faudra qu’il soit pur ainsi que de l’écume
« Et je le tremperai pour cela dans la mer.

« Je le dédaignerai s’il ne se fait connaître,
« Je ne veux pas qu’il soit l’imprévu, le hasard,
« Eh ! quoi, le saluer à jamais pour le maître,
« Parce qu’il aura ri, tout à coup, du regard !…