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JE VOUS ACCUSERAI…


Je vous accuserai, vous que j’ai tant chéri,
Je vous accuserai devant l’arbre fleuri,
Et le ciel agité dans ses nocturnes voiles,
Quand l’Infini s’écroule au milieu des étoiles…

Je vous accuserai, mon cruel bien-aimé,
Quand j’ouvre une urne close où l’ambre est enfermé,
Quand je tiens un raisin et que le jour le frappe
Dans les trente grains noirs ou jaunes de sa grappe.

Je vous accuserai, je vous accuserai,
Je ne vous dirai rien : pourtant, je vous crierai,
Avec tout mon silence et toute ma tristesse :
« Qu’avez-vous fait, méchant, de ma belle jeunesse ? »

Avant, j’aimais la vie en joignant mes deux mains,
La pente de soleil et d’ombre des chemins,
L’inépuisable azur, fleuve du paysage,
Et l’odeur de l’année offerte à mon visage.