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Et le rêve vous noie en des flots d’ondes bleues,
Et l’on voudrait partir bien loin, faire des lieues,
Et porter son amour dans le soleil levant,
Et le faire goûter aux ruisseaux des prairies,
Et le mêler au suc des herbes haut fleuries
Et le faire étoiler par les larmes du vent.

« Mon amour, mon amour, dit-on, je vous emmène,
« Vous êtes là, tout seul, tout blanc sous mon haleine,
« Vous êtes là, dans mes cheveux, dans ma douceur,
« Comme vous êtes pur, ô mon unique fleur !…
« Vous êtes tout mon or et toute ma fortune,
« Et tous mes jours de joie et tous mes soirs de lune,
« Je vous regarde vivre et j’ai peur de mourir…
« Mon cœur peut-il aller au fond de son soupir ?…
« Je vous donne le ciel et les mers d’Italie,
« Je vous donne la nuit et le rire de Dieu,
« Je vous donne, ô Splendeur, les rubis et le feu
« Et la larme qui roule à ma lèvre pâlie…

« Mon cher amour, endormez-moi, réveillons-nous…
« Je ne sais plus penser, je vous dis des mots fous,
« Et vous vous envolez de mes doigts, ô Merveille,
« Ainsi qu’un rayon d’or où se mêle une abeille.
« Ô vous le dévêtu, vous le nu, je vous vois
« Doux de tous les parfums dont se baignent les rois,
« Vous êtes l’orient, les baumes et les voiles,