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PÉNÉTRATION


J’aurai goûté vos yeux, votre front, votre main
Plus que je n’ai goûté l’eau limpide et le pain,
Votre bouche m’aura pour toujours abreuvée,
Votre âme je l’aurai tout entière rêvée,
Je vous ai convoité comme on convoite l’or,
Je vous ai possédé comme on étreint la mort,
Je vous ai parcouru comme une route neuve,
Vous avez ondoyé dans mes bras comme un fleuve,
J’ai chargé votre front de toute la beauté,
Je n’ai plus su qu’en vous recueillir la clarté.
Toutes mes nuits n’étaient faites que de votre ombre,
Et vous m’avez semblé sans limite et sans nombre,
Et vous m’avez paru grand de tout l’univers.
En moi vous affluiez avec le bruit des mers,
Avec les cris humains et le souffle du rêve,
Vous étiez doux en moi de même qu’une grève,
Sonore comme un bois quand les vents sont épars,
Vous avez à jamais habité mes regards,
Vous m’avez faite triste et splendide sans trêve