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Mgr RIDEL

immense qui se creusait en son âme. Dans ses lettres il l’avoue simplement à ses parents, à ses amis ; mais il a toujours une parole qui calme la douleur, un baume pour la plaie qui saigne encore. C’est ainsi qu’il écrit à son vénéré père, cinq mois après la séparation :

« Que je pense à toi ! Tous les matins, à la sainte messe, ton nom vient le premier sur mes lèvres, parce qu’il est le premier dans mon cœur. Ah ! mon bien cher père, nous sommes séparés, et sans doute pour toujours. Cette pensée est bien pénible pour moi et fait à mon cœur la blessure la plus profonde, mais l’espoir qu’au ciel nous nous retrouverons pour aimer Dieu et vivre heureux ensemble, voilà ce qui me soutient, ce qui me donne force et courage pour accomplir les desseins de Dieu sur moi et répondre à son appel. Il me semble voir au ciel cette bonne mère que j’ai trop peu connue, mais tant aimée. Elle veille sur nous, elle prie pour nous. Nous sommes l’objet de sa sollicitude comme lorsqu’elle était sur la terre au milieu de nous. Il me semble entendre sa voix qui nous appelle et nous invite à partager son bonheur. »

À mesure que l’heure du départ approche, le futur missionnaire redouble de ferveur et de piété. Il aspire de plus en plus à cette vie d’immolation dont son âme a goûté les prémices.

Les supérieurs ont reconnu ses vertus et son zèle, malgré le voile de l’humilité qui les abrite. Le 2 juillet 1860, il écrit à sa famille : « Dieu vient de m’appeler d’une façon plus spéciale pour travailler à sa gloire et au salut des âmes. J’apprends ma destination. Je vais en Corée, au nord de la Chine. Je partirai par la mer Rouge, avant la fin de ce mois. » C’est à peu près tout le contenu de cette lettre. On dirait, en la