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d’abord une grande cour, où sont, à gauche, les logemens du concierge et du portier. De là on arrive dans le cimetière, dont la vue étonne et frappe tout individu qui y entre pour la première fois. On voit alors, encore sur la gauche, un long bâtiment qui servait autrefois de serres chaudes, et qui, maintenant, quoique tombant en ruines, renferme les ateliers d’un marbrier qui s’y est établi, et s’y occupe à faire d’avance des tombes, destinées à prendre place dans le cimetière.

L’enclos qui forme le cimetière était autrefois la propriété du fameux confesseur de Louis XIV, le père La Chaise. Le monarque voulant témoigner à son confesseur sa satisfaction, choisit cet emplacement pour lui construire une maison de campagne et un parc. Cette circonstance fit nommer ce lieu le Mont-Louis, et long-temps il a gardé cette dénomination, qui rappelait que c’était un ouvrage de Louis-le-Grand. On ne commença à lui donner le nom du père La Chaise, qu’à l’époque de la révolution, et lorsque la mode était de déclamer contre les prêtres et contre leurs œuvres.

La maison que Louis XIV avait fait bâtir pour le jésuite La Chaise, existe encore aujourd’hui ; mais depuis long-temps elle est abandonnée, et l’était bien avant même que l’on songeât à faire de son enclos un cimetière. Elle est dans un état de délabrement qui contraste singulièrement avec l’éclat dont elle devait briller, dans le temps où, sur les pas de la dévote madame de Maintenon, toute la cour se portait en foule dans le manoir du jésuite, devenu l’arbitre de Louis XIV et de toute la France. C’est dans cette maison, maintenant la retraite des chauve-souris et des oiseaux nocturnes, qu’ont été, pendant si long-temps, agitées ces vaines et futiles questions de controverse, qui ont divisé, ensanglante la France, et peut-être préparé l’horrible tempête de notre révolution. Ah ! qui eut dit à ce père La Chaise, alors si puissant, qu’un temps viendrait ou son nom, si crains,