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MÉDITATION IV

mais d’avaler un verre d’eau sucrée, ou une tasse de bouillon, pour consoler l’estomac ; d’attendre ensuite douze ou quinze minutes, sinon l’organe convulsé se trouve opprimé par le poids des aliments dont on le surcharge.

grands appétits.

25. — Quand on voit, dans les livres primitifs, les apprêts qui se faisaient pour recevoir deux ou trois personnes, ainsi que les portions énormes que l’on servait à un seul homme, il est difficile de se refuser à croire que les hommes qui vivaient plus près que nous du berceau du monde ne fussent aussi doués d’un bien plus grand appétit.

Cet appétit était censé s’accroître en raison directe de la dignité du personnage ; et celui à qui on ne servait pas moins que le dos entier d’un taureau de cinq ans était destiné à boire dans une coupe dont il avait peine à supporter le poids.

Quelques individus ont existé depuis pour porter témoignage de ce qui a pu se passer autrefois, et les recueils sont pleins d’exemples d’une voracité à peine croyable, et qui s’étendait à tout, même aux objets les plus immondes.

Je ferai grâce à mes lecteurs de ces détails quelquefois assez dégoûtants, et je préfère leur conter deux faits particuliers, dont j’ai été témoin, et qui n’exigent pas de leur part une foi bien implicite.

J’allai, il y a environ quarante ans, faire une visite volante au curé de Bregnier, homme de grande taille, et dont l’appétit avait une réputation bailliagère.

Quoiqu’il fût à peine midi, je le trouvai déjà à table. On avait emporté la soupe et le bouilli, et à ces deux