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DU GOÛT.

certain bien-être indéfinissable et particulier, qui vient de la conscience instinctive, que, par cela même que nous mangeons, nous réparons notre perte et nous prolongeons notre existence.

C’est ce qui sera plus amplement développé au chapitre où nous traiterons spécialement du plaisir de la table, pris au point où la civilisation actuelle l’a amené.

suprématie de l’homme.

14. — Nous avons été élevés dans la douce croyance que, de toutes les créatures qui marchent, nagent, rampent ou volent, l’homme est celle dont le goût est le plus parfait.

Cette foi est menacée d’être ébranlée.

Le docteur Gall, fondé sur je ne sais quelles inspections, prétend qu’il est des animaux chez qui l’appareil gustuel est plus développé, et partant plus parfait que celui de l’homme.

Cette doctrine est malsonnante et sent l’hérésie.

L’homme, de droit divin roi de toute la nature, et au profil duquel la terre a été couverte et peuplée, doit nécessairement être muni d’un organe qui puisse le mettre en rapport avec tout ce qu’il y a de sapide chez ses sujets.

La langue des animaux ne passe pas la portée de leur intelligence : dans les poissons, ce n’est qu’un os mobile ; dans les oiseaux, généralement, un cartilage membraneux ; dans les quadrupèdes, elle est souvent revêtue d’écailles ou d’aspérités, et d’ailleurs elle n’a point de mouvements circonflexes.

La langue de l’homme, au contraire, par la délicatesse de sa contexture et des diverses membranes dont elle est environnée et avoisinée, annonce assez