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MÉDITATION I.

Telle est la destinée de l’homme, considéré comme être sensitif : c’est à cette double fin que se rapportent toutes ses actions.

L’œil aperçoit les objets extérieurs, révèle les merveilles dont l’homme est environné, et lui apprend qu’il fait partie d’un grand tout.

L’ouïe perçoit les sons, non-seulement comme sensation agréable, mais encore comme avertissement du mouvement des corps qui peuvent occasionner quelque danger.

La sensibilité veille pour donner, par le moyen de la douleur, avis de toute lésion immédiate.

La main, ce serviteur fidèle, a non-seulement préparé sa retraite, assuré ses pas, mais encore saisi, de préférence, les objets que l’instinct lui fait croire propres à réparer les pertes causées par l’entretien de la vie.

L’odorat les explore, car les substances délétères sont presque toujours de mauvaise odeur.

Alors le goût se décide, les dents sont mises en action, la langue s’unit au palais pour savourer, et bientôt l’estomac commencera l’assimilation.

Dans cet état, une langueur inconnue se fait sentir, les objets se décolorent, le corps plie, les yeux se ferment ; tout disparaît, et les sens sont dans un repos absolu.

À son réveil, l’homme voit que rien n’a changé autour de lui ; cependant un feu secret fermente dans son sein, un organe nouveau s’est développé ; il sent qu’il a besoin de partager son existence.

Ce sentiment actif, inquiet, impérieux est commun aux deux sexes ; il les rapproche, les unit, et quand le germe d’une existence nouvelle est fécondé, les individus peuvent dormir en paix : ils viennent de remplir