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qu’il le dirige avec cet aiguillon que vous le voyez lancer sur cette bête comme une ancre, qu’il ne s’effraye ni de la vue de cet animal, ni de sa hauteur, ni de sa force, cela tient du ? prodige, et je n’y eusse pas cru moi-même, par Minerve, si un autre me l’avait dit. — Et combien donneriez-vous pour avoir cet enfant, si l’on voulait vous le vendre ? — Par Jupiter, je donnerais tout ce que je possède. Car se tenir assis, après être monté à l’assaut de cette espèce de forteresse, et commander à l’animal le plus monstrueux de tous ceux que nourrit la terre, c’est là, selon moi, la marque d’une nature généreuse et rare. — Mais que feriez-vous de ce garçon, si vous n’achetiez en même temps l’éléphant ? — Je le mettrais à la tête de ma maison et de mes serviteurs, et il leur commanderait bien mieux que moi. — Vous n’êtes donc pas capable de commander chez vous ? — Autant que vous, Apollonius ; et la preuve, c’est que j’ai abandonné ma maison, et que me voici par voies et par chemins, comme vous, cherchant à m’instruire et avoir ce qui se passe dans les pays étrangers. — Je suppose que vous ayez acheté cet enfant, et que vous ayez deux chevaux, un cheval de course et un cheval de guerre ; le chargeriez-vous des deux ? — Peut-être ne le chargerais-je que du cheval de course, car je vois souvent des enfants sur ces sortes de chevaux. Mais comment pourrait-il monter un cheval de guerre et le mener au combat ? Il ne pourrait, comme les cavaliers, porter le bouclier, le casque et la cuirasse. Et la lance, comment pourrait-il la manier, cet enfant qui serait embarrassé pour lancer une flèche ou un javelot, ce garçon qui balbutie encore, si je ne me trompe ? — Concluez-en, mon cher Damis, que ce qui gouverne cet éléphant et le conduit, c’est autre chose que cet enfant, qui excite votre admiration, et que vous êtes tout près d’adorer. — Et quelle