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as eu peu de paroles à prononcer. Tu es arrivé avec ta vie, avec une façon de prendre dans tes mains la matière humaine et de la poser devant toi. Je ne sais pas si tu la pénètres toute, je ne sais pas si tu la comprends, mais je sais que tu la possèdes. Tu vois, maintenant : tu es ici, tu parles. Tu peux parler, toi, tu as achevé ta conquête, tu es assis, le moment est venu où tu peux réfléchir. Mais moi, je suis le mauvais capitaine qui cherche encore ses raisons. Et c’est comme cela que je te dis que tu vaux mieux que moi. Je ne m’en doutais pas du tout autrefois.

— Oui, dit Raphaël, vous êtes ainsi faits, vous autres. Vous avez si bon cœur que vous ne savez même pas où cela peut vous conduire. Et quand vous êtes à la fin, vous dites : « Ça y est, j’avais raison, j’ai marché tout droit et j’avais raison, puisque je suis arrivé. » Seulement, vous n’arrivez jamais où vous aviez cru. Tu t’en aperçois par toi-même. Vois-tu, mon vieux, vous êtes des poètes. Vous perdez tout votre temps. Vous pensez, vous parlez, vous dites : « J’attends quelque chose,