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donner tous les vôtres avancés, pour venir faire la guerre à ce miſérable qui n’a aucun mérite, & qui n’a rendu aucun ſervice dans le courant de la partie. C’eſt aſſurément tout oppoſé aux maximes de la guerre, où le mérite ſeul peut contribuer à l’avancement d’un ſimple Soldat : de plus, lorſque le Roi roque il a le privilège de pouſſer en même tems le Pion de la Tour, & dans ce cas il joue encore deux fois de fuite. Selon moi toutes ces difformitez ont été introduites par des chicanneurs, qui pour leur avantage auront fait jouer les gens à leur fantaiſie.

Dans ce beau chemin de Critique, il m’eſt impoſſible d’avoir aſſez de complaiſance pour épargner mes compatriotes, qui ont donné dans une erreur auſſi grande que celle des Allemands. Ils ſont d’autant moins pardonnables, qu’il y a parmi eux une quantité de très bons joueurs, & même des plus excellens de l’Europe. Il eſt donc à préſumer qu’ils ſe ſont laiſsez entraîner (comme j’ai fait autrefois) par une mauvaiſe coutume, établie, ſelon toute apparence, par quelqu’ignorant qui aura été l’introducteur de ce jeu dans le Royaume, je me perſuade que c’étoit un joueur de Dames qui ne ſachant, à peu près, que la marche des Échecs, s’imaginoit qu’en allant à Dame, on en pouvoit faire autant que ſur un Damier. Je demande donc (ſans citer Palamede, ou d’autres qui ont limité ce jeu à une ſeule Dame, deux Tours, deux Chevaliers,