Page:Phèdre - Fables, trad. Panckoucke, 1864.djvu/63

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LIVRE I. 15


FABLE XIV
LE CORDONNIER MÉDECIN

Un mauvais Cordonnier, perdu de misère, mourant de faim, alla exercer la médecine dans un pays où il n’était pas connu. Il vendait un faux antidote, et son verbiage lui eut bientôt fait un renom. Le roi de la ville, qu’une grave maladie retenait au lit, voulut mettre son savoir à l’épreuve. Il demanda une coupe, y versa de l’eau, et feignit de mêler du poison à l’antidote du prétendu médecin ; puis, il lui ordonna de boire, lui promettant une récompense. La peur de la mort fit alors avouer à notre homme que ce n’était pas à ses talents en médecine, mais à la sottise du vulgaire, qu’il devait sa réputation. Le roi assemble les habitants, et leur dit : « Voyez la folie qui vous aveugle ; vous allez confier vos têtes à celui à qui personne n’a voulu donner ses pieds à chausser. »

Ceci regarde, à mon avis, ceux qui, par leur sottise, enrichissent l’impudence.