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FABLE V
Le paysan et l’âne

Chacun doit se priser ce qu’il est, se contenter de son mérite personnel, et ne pas s’approprier les avantages d’autrui, sous peine de devenir la risée du public, quand, privé de ces splendeurs, on reparaît dans sa nudité première.

Un Âne trouva la dépouille d’un lion de Gétulie, se revêtit de cette nouvelle parure, adapta à ses membres cette peau qui leur convenait si peu, et chargea sa tête ignoble de ce masque imposant. Dès qu’il se crut en état de répandre autour de lui l’épouvante, et qu’une vigueur factice eut animé ses membres paresseux, il foule aux pieds les communs pâturages des troupeaux paisibles, et, dans leurs prairies, alarme les génisses craintives. Un Paysan le reconnait à sa longue oreille, lui passe un licou et le réduit à coups de fouet ; puis, arrachant la peau dont s’était affublé le misérable quadrupède, il lui adresse ces dures paroles : Tu peux,