Page:Pfeiffer - Voyage d une femme autour du monde, trad. de Suckau, Hachette, 1859.djvu/103

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

farine de manioc. Les enfants avaient aussi devant eux leurs citrouilles, mais ils étaient forcés de défendre bravement leurs provisions, car tantôt une poule, tantôt un chien leur enlevait quelque morceau, ou bien c’était un petit cochon de lait qui arrivait en chancelant et qui grognait de plaisir quand il n’avait pas fait une course inutile.

Pendant que je poursuivais le cours de mes observations, des cris joyeux partirent tout à coup en dehors de la cour. Je me dirigeai aussitôt du côté d’où ils venaient, et je vis deux garçons traînant par une corde d’écorce un grand serpent d’un noir foncé, qui avait certainement plus de 2 mètres de long. Ce serpent était déjà mort. Autant que je pus comprendre ce que l’on me disait, sa morsure est si dangereuse, qu’aussitôt après avoir été mordu on enfle et on meurt.

Ces renseignements ne laissèrent pas de m’inspirer quelque inquiétude. Du moins je ne voulus pas me hasarder le soir dans les bois, où il m’aurait peut-être fallu passer la nuit sous quelque arbre, et je remis au lendemain la visite que je comptais faire aux Indiens. Les bonnes gens s’imaginèrent que j’avais peur des sauvages et ne cessèrent de m’assurer que c’étaient des hommes inoffensifs, dont je n’avais absolument rien à craindre. Comme toute ma connaissance du portugais se réduisait à peu de mots, j’eus quelque peine à me faire comprendre, et ce ne fut qu’à l’aide de gestes et quelquefois de dessins que je parvins à leur expliquer la véritable cause de ma peur.

Je passai donc la nuit chez ces blancs à moitié sauvages, qui me témoignèrent constamment le plus grand respect et me comblèrent de prévenances. Sur ma demande, on m’étendit dans la cour une natte de paille en guise de lit. Pour souper on me servit un poulet rôti, du riz, des œufs durs, et pour dessert on me donna des oranges et des gousses de tamarin ; ces dernières renferment une