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mon second voyage

ou sur des chevaux. Les marchands détaillants, les porteurs d’eau se servent d’ânes. Les ânes sont ici très maltraités ; souvent une de ces pauvres bêtes porte toute la famille, mari, femme et enfants, et quelquefois en outre un gros fardeau. Aussi un proverbe péruvien dit : « Lima est l’enfer des ânes, le purgatoire des maris et le paradis des femmes. » Si la métempsycose existait, on deviendrait fou rien qu’à penser qu’on pourrait être métamorphosé en âne au Pérou ou bien en cheval de poste à Java.

L’indigène traite le lama infiniment mieux : il s’en sert bien aussi comme de bête de somme ; mais il lui témoigne de l’amitié et de l’affection, on dirait presque du respect. Le lama a, de la plante des pieds au sommet de la tête, 1 mètre et demi de haut, et appartient à l’espèce du chameau. On se sert des lamas pour porter des fardeaux ; dans les mauvaises routes des Cordillières, ils sont bien plus utiles que les ânes et les mulets, et portent ordinairement le minerai dans les bas-fonds. Un lama fait par jour de 3 4  leguas et porte cent livres ; si on lui impose une plus forte charge, il se couche par terre et ne se relève pas qu’on ne l’ait débarrassé de la surcharge[1].

On voit rarement ces beaux et doux animaux à Lima, car ils ne peuvent pas supporter un climat chaud. Le hasard voulut cependant que, pendant mon séjour à Lima, un petit troupeau de quarante à cinquante lamas passât par la ville pour porter du sel dans la montagne.

Quand on les irrite, ils crachent autour d’eux. Leur salive est, dit-on, si piquante et si corrosive, qu’elle produit une douleur brûlante à la peau.

Indépendamment du fait assez rare de voir des lamas à Lima, il y tomba aussi une assez forte pluie qui dura cinq ou six heures, phénomène dont les plus vieilles gens n’a-

  1. Un âne porte habituellement deux cents livres, un mulet trois cents.