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mon second voyage

déjà plus depuis longtemps. Beaucoup avaient ou perdu ou déchiré leurs papiers ; d’autres étaient morts, et les héritiers manquaient de preuves. Cependant on leur faisait dire sous main qu’on reconnaîtrait facilement leurs réclamations ; seulement on les engageait à indiquer des sommes plus fortes, afin que par une mesure apparente de justice on pût faire quelque réduction. Les agents du président et de son parti achetaient ces papiers en secret à vil prix, et par ces menées, comme par le maniement des deniers publics et par le commerce du guano, le président doit déjà avoir mis de côté plusieurs millions de dollars.

La révolution actuelle n’avait pas encore pénétré jusqu’à Lima. Le président avait encore pour lui les militaires ; il soldait en outre, tant de la caisse de l’État que de sa cassette particulière, une légion d’espions qui, au moindre soupçon, se saisissaient d’une personne et la livraient au gouvernement. Beaucoup languirent dans les prisons, d’autres furent exilés du pays[1]

Il y a déjà bien des années que le Pérou a le malheur d’être gouverné par des fonctionnaires intéressés et cupides, qui ne songent à rien autre chose qu’à remplir leurs poches.

Le 19 janvier, je me rendis à Lima, où le consul de Hambourg, M. Rodewald, eut la bonté de m’inviter à venir demeurer chez lui. J’appréciai d’autant plus cette complaisance que l’on ne parle, pour ainsi dire, dans le pays que l’espagnol, langue avec laquelle je ne m’étais pas encore familiarisée.

De Callao à Lima (deux leguas ou six milles anglais), le trajet se fait depuis 1851 par un chemin de fer, dont la pente est si forte (135 mètres), que pour descendre de Lima à Callao on n’a pas besoin de vapeur. Ce qui me

  1. J’appris plus tard, par les journaux, que la révolution s’était terminée par la chute du président.