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mon second voyage

San-Francisco. D’après l’opinion des Américains, Sacramento est aussi une des merveilles du monde, puisqu’elle s’est élevée avec autant de rapidité que San-Francisco, et a été brûlée aussi souvent.

À 11 heures je me remis en route. Après avoir fait quelques milles, nous entrâmes dans le Feather, sur lequel se trouve Mary’s-Ville. Les rives du fleuve sont d’une uniformité désespérante ; aussi, après les avoir considérées quelque temps, je me rendis au salon pour faire mes remarques sur la société. Je me trouvai pour la première fois dans une grande société d’Américains indépendants. Comme dans les maisons de jeu de San-Francisco, ce furent les contrastes d’habillement qui me frappèrent d’abord. Les dames étaient en général excessivement parées et auraient pu paraître dans le monde avec leurs habits de voyage. Il en était tout autrement des hommes. Plusieurs étaient à la vérité mis convenablement ; mais la plupart avaient des jaquettes déchirées, des bottes sales passant par-dessus leur pantalon, et, chose que je remarquai même chez les messieurs les mieux vêtus, les mains aussi épaisses et aussi hâlées que les derniers des paysans. On jouait aux cartes, on mâchait du tabac, et des enfants de dix à douze ans faisaient la même chose ; mais on ne crachait pas autant autour de soi que le prétendent plusieurs voyageurs. Une autre habitude qui n’est pas moins sale que de cracher est qu’on se sert bien de mouchoirs, mais après s’être mouché dans ses doigts, ce que je vis faire à des messieurs élégamment mis.

Je dois rendre aux hommes cette justice qu’ils étaient tous également empressés et complaisants avec toutes les personnes de mon sexe, vieilles ou jeunes, richement ou pauvrement vêtues. Les Américains ne ressemblent pas en cela à mes compatriotes, et en général aux Européens, qui ont l’habitude de ne se montrer aimables qu’envers la jeunesse, la beauté et la toilette.