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mon second voyage

j’eusse souvent entendu affirmer le contraire. Je n’aurais pas pu distinguer, à la physionomie des joueurs, celui que la fortune favorisait et celui qui perdait. Ces maisons ne sont pas organisées seulement de manière à exciter la passion du jeu, mais aussi à charmer et à enivrer les sens. Des peintures horriblement licencieuses sont pendues aux murs ; une musique bruyante retentit dans les vastes salons ; de belles jeunes filles se tiennent çà et là près des tables.

J’ai été partout dans le monde ; j’ai vu des peuples qui, par l’effet du climat, par le manque d’instruction et de religion, sont d’une grande sensualité ; mais nulle part je n’ai vu de maisons de débauche aussi éhontées : on ne voit de ces choses que chez les peuples chrétiens, que dans les pays civilisés. Je ne veux pas prétendre que l’immoralité soit moindre chez les peuples non chrétiens, mais leur impudence ne va pas jusqu’à en faire un pareil étalage.

Je ne veux rien dire des autres lieux de divertissement, des maisons de danse, des maisons chinoises de jeu et de rafraîchissement : je n’ai qu’une chose à remarquer, c’est que les maisons de jeu chinoises sont plus décentes que les maisons de jeu américaines ; il n’y a ni tableaux, ni musique, ni jeunes filles, ou du moins ces dernières ne se tiennent pas dans les salons où l’on joue.

L’abondance de l’or à San-Francisco est si grande, les prix sont si élevés, qu’il n’y a pas de monnaie de cuivre en circulation ; les habitants ne désirent pas non plus qu’on en vienne jamais là. Chacun trouve de quoi vivre ; on manque seulement encore d’hommes : ce qui n’empêche pas qu’il ne se passe guère de nuit que l’on n’entende parler de vol. Dans toutes les chambres à coucher l’on voit, des pistolets accrochés à la muraillé, et le soir on ne sort jamais sans épée ou sans pistolet, car il arrive