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mon second voyage

à côté de nous vint à notre bord. À peine nous avait-il quittés qu’il s’éleva subitement une bourrasque ; nous craignions qu’il ne pût rejoindre son navire : il n’y parvint en effet qu’avec peine.

Le 22 juillet dans l’après-midi, il y eut une tempête terrible : nous fûmes obligés de carguer toutes les voiles et nous redoutions un typhon.

Le lendemain, par une tempête continue, nous pénétrâmes dans l’océan Pacifique, entre Luzon et la hauteur de Formosa. Depuis lors nous ne vîmes, pendant deux mois d’une longueur interminable, que le ciel et l’eau. Les seules créatures vivantes que nous aperçûmes de temps en temps étaient quelques mouettes qui voltigeaient autour de nos voiles.

Dans cette traversée je fus prise de nouveau de fièvres intermittentes, que je ne pouvais cependant attribuer ni à la nourriture ni à aucune autre cause que je connusse. La nourriture était si bonne, que je ne fus obligée qu’une seule fois dans tout le voyage de manger de la viande salée. Ma cabine était aussi spacieuse qu’une petite chambre, et le bon et complaisant capitaine veillait à tous mes besoins avec la plus grande amabilité. Quelle différence entre ce voyage et celui de Londres au cap de Bonne-Espérance, sur le vaisseau du capitaine Brodie ! Encore aujourd’hui je ne pense à cette dernière traversée qu’avec effroi.

26 septembre. Enfin retentit le cri si longtemps désiré : « Terre, terre ! » Le soir, la côte de la Californie s’étendait devant nos yeux. Et cependant, quoique j’eusse passé près de trois mois dans ma prison de bois, la vue de cette côte, loin de me produire un effet agréable, ne fit sur moi qu’une impression pénible. Elle était au delà de toute expression déserte et morne. Des collines de sable s’élevaient de tous côtés, nues et escarpées. Aucun arbre, aucune broussaille, pas le moindre brin d’herbe ne venait interrompre les teintes uniformes de ce triste désert. « C’est ici, pensais-