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profit du roi. Mais Sa Majesté a trouvé qu’il y aurait de très grands inconvénients et a mieux aimé prendre de nouvelles dispositions. — Une ordonnance locale, du 5 septembre 1742[1], rendue à la requête de la dame de Silvecanne, déclare nulle la liberté accordée à 16 esclaves par son mari sans la ratification des administrateurs.



III

C’est à peu près vers cette époque que, pour enrayer les affranchissements, on imagina d’ajouter à la nécessité d’une autorisation celle du paiement d’une certaine somme. Moreau de Saint-Méry, dans ses notes manuscrites[2], dit qu’il n’est pas possible de préciser la date exacte à laquelle cet usage commença à être établi. D’après lui, on trouve la preuve qu’il était en vigueur dès 1740 dans des payements exigés sous l’administration de MM. de Champigny et de La Croix. Peut-être ces administrateurs avaient-ils pris sur eux de les exiger. Mais, en tout cas, la mesure n’avait pas été encore ratifiée par le roi. En effet, ce n’est que le 8 juillet 1745 que le Ministre écrit à ce sujet aux administrateurs de la Martinique, MM. de Caylus et de Ranché[3]. Comme toujours, il est question des libertés trop facilement accordées par les maîtres, « particulièrement à des négresses et des mulâtresses, et le plus souvent pour prix du commerce qu’ils ont eu avec elles ». Aussi a-t-il été proposé d’imposer un droit[4] de

  1. Moreau de Saint-Méry. III, 703.
  2. Arch. Col., F, 134. p. 176.
  3. Arch. Col., B, 81. p. 46.
  4. Hilliard d’Auberteuil, op. cit., II, 73, est d’avis que c’est un palliatif bien insuffisant. Il distingue trois cas : « Dans le premier cas, un homme opulent ne sera point retenu par la crainte de payer ; l’amour de l’argent ne l’empêchera pas de faire une action généreuse : dans le second cas, il ne balancera pas à faire à sa passion un sacrifice de plus ; dans le troisième, il exigera de son nègre une plus forte rançon. »