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Coloniales[1]. Nous y relevons une disposition intéressante, mais nous ne croyons pas qu’elle ait été transformée en loi. « Les noirs et mulâtres auxquels il aura été permis de rester dans le royaume, est-il dit à l’article 19, pourront, comme les autres sujets de Sa Majesté et en se conformant aux ordonnances, arrêts et règlements qui les concernent, exercer tels arts et professions qui leur conviendront, sans néanmoins qu’ils puissent jamais parvenir à la qualité de maîtres dans leur communauté, ni tenir pour leur compte particulier magasin ou boutique de marchandise. » On craignit sans doute de se montrer trop libéral.

En somme, malgré les prescriptions multipliées, beaucoup de noirs restaient en France. Ainsi, le 16 février 1781, l’intendant de Saint-Domingue écrit au marquis de Castries[2], en lui envoyant un état des gens de couleur passés en France et pour lesquels il a été consigné 16.500 livres : « Vous pouvez y voir, Monseigneur, que, malgré la sévérité des règlements, il n’en est revenu aucun depuis 1778. » — Un rapport du 9 mars 1782[3], non signé, exprime l’avis que les esclaves ne peuvent avoir leur domicile en France. « Quant à l’état des personnes, il n’appartient qu’aux juges du domicile, conséquemment aux juges des colonies. » C’est donc à tort, suivant l’auteur, que les juges de l’Amirauté jugent les nègres esclaves et les affranchissent en vertu de l’arrêt du 7 septembre 1777 ; ces causes ne sauraient être jugées que par les tribunaux des colonies. Il ne faudrait pas affranchir des esclaves par ce seul fait qu’ils n’ont pas été déclarés par leurs maîtres et renvoyés ensuite aux colonies. Ce Mémoire dut être préparé pour le Comité de législation, qui avait été établi à cette époque, spécialement pour les colonies. Ledit Comité jugea que le renvoi des esclaves aux colonies, étant chose de pure administration, ne regardait en rien la législa-

  1. F6, Police des nègres. France. Carton A.
  2. Arch. Col., F6, Ib.
  3. Ib., ib.