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250 livres pour chaque nègre pris, « eu égard à l’éloignement des lieux ». C’est la plus forte prime qui ait été exigée. Il était, en outre, accordé des exemptions de droits curiaux aux habitants qui avaient poursuivi les marrons. — Dans une ordonnance des administrateurs de Saint-Domingue[1], il est dit que des habitants, ayant plusieurs terrains et ne pouvant « les établir tous », se contentent d’y placer des nègres invalides pour en conserver la possession. Or ces terrains servent de refuge aux nègres marrons ; aussi est-il prescrit d’y mettre au moins un blanc ou un mulâtre libre.

Nous relevons, à la date du 8 mars 1733[2], l’enregistrement à la Guadeloupe de remontrances faites par le procureur du roi au sujet d’expressions dangereuses sous le rapport de la subordination des esclaves dont s’était servi un jésuite dans un sermon. « Les hommes se révoltent contre Dieu ; les noirs se révoltent contre les blancs et en cela vengent Dieu ; le temps n’en est pas loin. » Le procureur fait remarquer le danger qu’il y aurait à soulever 30.000 noirs contre 2.500 blancs.



III

Il arrivait que des esclaves se réfugiassent à l’étranger. Par exemple, de 1702 à 1732, il s’était sauvé 93 nègres « de la Grenade à la Marguerite Espagnole[3] ». C’est de Saint-Domingue surtout qu’ils fuyaient chez les Espagnols, et de la Guyane chez les Hollandais et les Portugais. « Un arrêt du Conseil de Léogane, 1er juillet 1709, décida qu’une personne de confiance serait chargée d’aller chercher les esclaves français sur le sol espagnol et de les en ramener, moyennant que le maître lui paierait la moitié de leur valeur. Il paraît

  1. Moreau de Saint-Méry, III, 369, 21 août 1733.
  2. Arch. Col., F, 224, p. 791.
  3. Arch. Col., F, 134, p. 21. Lettre de Larnage, du 23 mai 1732.