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Un arrêt du Conseil de Léogane, du 16 mars 1705[1], établit 36 hommes dans chaque quartier du Petit-Goave, Léogane et Cul-de-Sac, pour rechercher les marrons, fixe la prime de prise de 30 à 60 livres suivant les lieux, ordonne une levée publique de 15.000 livres pour payer lesdits hommes et les nègres tués, règle la comptabilité de cette levée et les droits du receveur, soit un 10e et enfin enjoint à ce dernier de fournir un recensement fidèle. Ce règlement fut approuvé par une lettre du Ministre à M. Deslandes, en date du 14 avril 1706. — Notons à la même époque[2] une affaire assez curieuse au sujet d’un nègre vendu par des religieuses, à condition qu’il soit emmené dans l’île de Grenade, et sans pouvoir revenir, parce qu’il est séditieux, ameutant jusqu’à 60 autres nègres, les poussant à la révolte et vivant dans le libertinage. Or ledit nègre a été revendu à un autre propriétaire qui l’a ramené à la Martinique. Mais l’intendant déclare qu’il ne saurait y rester.

Tandis qu’on prend toutes sortes de mesures pour se préserver des marrons, il est curieux de constater qu’on cherche, pendant la guerre de la succession d’Espagne, à aider ceux des ennemis. Le 20 août 1706, le Ministre écrit à M. Deslandes[3] : « Vous rendriez un service important si vous pouviez trouver les moyens de secourir les nègres de la Jamaïque qui sont révoltés et leur faire porter quelques armes et munitions de guerre, de sorte qu’ils occupent les Anglais et diminuent la force de la colonie ; vous aurez soin de m’informer de la situation de ces nègres et de leur nombre, si vous pouvez en avoir quelque connaissance. »

Mais il semble que la guerre favorise aussi les esclaves des Antilles françaises, car les prescriptions et les condamnations s’accumulent contre eux. Dans un rapport de Lefebvre d’Albon, du 15 mai 1707[4], il est question de plusieurs nègres

  1. Moreau de Saint-Méry, II, 25.
  2. Arch. Col., F, 250, p. 343, 14 octobre 1705.
  3. Arch. Col., B, 28, p. 142.
  4. Arch. Col., Col. en général, XIII, F, 90.