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10 libres contre 1 esclave, tandis qu’aux Antilles on comptait 20 esclaves pour 1 libre. Sur 20 crimes, il aurait fallu en laisser 19 impunis. Rappelant l’arrêt de 1686, il exprime l’avis qu’il y aurait lieu d’examiner dans quelle mesure le témoignage des nègres peut servir même contre leurs maîtres.

Naturellement les esclaves ne pouvaient ester en justice, tant en demandant qu’en défendant ; ils ne pouvaient non plus se porter partie civile ni poursuivre en matière criminelle la réparation des outrages et excès qui auraient été commis contre eux. C’était uniquement à leurs maîtres qu’il appartenait d’agir (article 31 du Code Noir). Comme on disait en droit romain : Personam non habent, caput non habent.



VI

On les compte comme têtes, mais uniquement pour évaluer leur valeur et les soumettre à l’impôt. Les maîtres sont, en effet, assujettis à deux sortes d’impôts pour leurs nègres : la capitation et les réquisitions.

Dès le 15 janvier 1676, une ordonnance de M. de Baas[1] porte que la déclaration faite par les habitants du nombre de leurs nègres devra être fidèle, sans quoi les nègres omis seront confisqués. Le droit à payer par tête n’est pas indiqué à cette époque. Du reste, il fut assez variable suivant les nécessités du moment : d’une façon générale, nous croyons qu’il peut être évalué à 10 livres en moyenne. En vertu d’un règlement de l’intendant des îles, du 16 mars 1682[2], les nègres mutilés de mains ou de pieds seront réputés invalides et ne paieront point de droit (art. 3). — Seront également exempts ceux de soixante ans et ceux qui n’auront pas atteint quatorze ans (art. 10). De plus, le roi accorde l’exemption de 12 nègres

  1. Arch. Col., F, 248, p. 163.
  2. Moreau de Saint-Méry, I, 364.