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d’eau-de-vie, mais c’est l’exception. Les nègres qui entrent au service des fourneaux de la sucrerie y restent sans sortir jusqu’à six heures du soir. Ils doivent s’arranger pour manger sans que le travail soit interrompu.

Il est juste de mentionner que les nègres employés comme ouvriers à diverses petites industries et surtout comme domestiques, ainsi que les négresses occupées aux travaux du ménage ou servant de nourrices, avaient une existence infiniment moins dure. Mais ceux-là étaient en petit nombre.



II

En compensation du labeur de forçat imposé à la plupart, que leur est-il dû ? Juste l’indispensable pour vivre, et encore, dans bien des cas, ne le leur donne-t-on pas.

Remarquons d’abord qu’il n’est nullement question, ni dans le Code Noir, ni dans aucun autre règlement, de la manière dont les esclaves doivent être logés. C’est pourtant une question assez importante. Comme on l’a dit, « cette obligation ne peut être considérée que comme résultant implicitement de celle de nourrir, vêtir et entretenir les esclaves en santé comme en maladie[1] ». Les renseignements que nous trouvons à cet égard nous sont encore fournis par le P. Du Tertre, par le P. Labat et par Moreau de Saint-Méry, qui tous trois ont vu les choses de près. Nous ne recourrons pas aux témoignages postérieurs, qui dépasseraient l’époque à laquelle nous devons nous arrêter. Contentons-nous simplement d’indiquer qu’à partir de la fin du xviiie siècle ce côté de la condition matérielle des esclaves s’améliora dans une certaine mesure, comme les autres[2], en vertu du progrès des idées d’humanité. Mais voici ce qui en était au début.

  1. Exposé général des résultats du patronage des esclaves, p. 267.
  2. Cette amélioration fut encore bien relative. Cf. Schœlcher, Colonies françaises. Le premier chapitre est consacré à la situation matérielle des esclaves.