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prudence admet un certain nombre de cas rédhibitoires. Telle est l’épilepsie, d’après une sentence du juge du Cap du 21 février 1699[1]. Un arrêt du Conseil de Léogane, du 15 juillet 1721[2], ordonne que les vendeurs de nègres atteints de folie ou de mal caduc seront, pendant le cours de six mois, tenus de les reprendre. Quelque temps après, il n’est plus question que de trois mois, d’après une lettre adressée, le 22 avril 1727, par le Ministre à l’administrateur de Cayenne[3] : il approuve, en effet, une ordonnance locale fixant ce laps de temps, et il dit que c’est la règle suivie dans les autres îles. Mais on paraît en être revenu définitivement au délai de six mois. C’est ainsi qu’en juge l’intendant de la Martinique, le 28 décembre 1740[4] : un marchand ayant vendu 100 nègres pour la somme de 100.856 livres est tenu de rembourser 500 livres pour prix d’un des nègres devenu fou. Le 19 février 1779, un arrêt du Conseil du Cap[5] accueille l’action rédhibitoire pour un nègre mort des suites d’une attaque de folie dans les six mois de la vente. L’imbécillité est indiquée aussi comme un cas rédhibitoire, suivant le Code de Saint-Domingue[6]. Quant aux hernies, dont les nègres étaient assez fréquemment atteints[7], elles n’étaient pas considérées comme cas rédhibitoires ; c’était au médecin qu’il appartenait de les constater. Ainsi on achetait un esclave à peu près comme on achète un cheval ou un bœuf. Si les esclaves ainsi vendus étaient de nouveau mis en vente, le vendeur était tenu d’indiquer leur maladie. Aussi personne n’en voulait-il. On en vit acheter pour 20 sols. Lorsqu’on ne pouvait s’en débarrasser, on les donnait aux religieux de la Providence ou on les employait d’une manière quelconque[8].

  1. Moreau de Saint-Méry, Loix et Constitutions, etc., I, 624.
  2. Id., Ib., II, 763.
  3. Arch. Col., B, 50, p. 361. Il y est question d’une maladie appelée loppe(?).
  4. Arch. Col., F, 246, p. 1015.
  5. Moreau de Saint-Méry. Loix et Constitutions, etc., V, 858.
  6. Arch. Col., F, 138, p. 394. Arrêt du 19 octobre 1787.
  7. Arch. Col., F, 61. Déposition du capitaine Littleton et de Jean Fontaine.
  8. Arch. Col., F, 133, p. 231.