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victoire la rouge.

luisants de faim. Son cœur devenait gros, et des sanglots lui gonflaient la gorge.

L’homme allait et venait, ne disant rien, préparant son souper.

Un grand feu de pommes de pin flambait dans l’âtre, où la soupe bouillait, découverte, maintenant que l’homme y trempait sa cuiller ronde qu’il ramenait pleine de légumes fumants et du liquide blond que, sur la taillée de pain bis, il versait bouillonnant.

Des frissons passaient sur les joues blêmes de Victoire. Elle tenait à deux mains ses flancs creux, les yeux fixes, dévorants, la bouche sèche. Tout à coup elle dit, étranglée de désir et de peur :

— S’il vous plaît, nous ne partagerons pas la ramassée de ce soir, et vous me donnerez seulement une assiettée de votre soupe ; voulez-vous bien ?

— Mais, dit l’homme, en se retournant, si vous vous arrêtez ici, il sera trop tard