Page:Peyrebrune - Victoire la rouge.djvu/196

Cette page a été validée par deux contributeurs.
188
victoire la rouge.

elle demeura effarée dans son hébétude brutale, avec cette éternelle pensée qu’elle allait bientôt avoir faim. Elle ne pleurait plus, les poings dans les yeux.

— Il faut vous en aller avant la nuit, lui dit doucement la fermière. Et voilà le soleil qui tourne derrière les chaumes, là-haut.

En effet, le coteau en face s’éteignait peu à peu, et le reflet rouge du couchant entrait maintenant par la fenêtre enfeuillée. Il allumait un à un, comme les cierges d’une chapelle, tous les points blancs de la salle assombrie. Il rosait en passant, d’une lueur nacrée, la joue pâle de la fermière, il tombait sur la chevelure fauve de Victoire, la coiffant comme d’un lambeau de pourpre flamboyante.

Elle se leva pour aller chercher ses hardes.

Quand elle revint, son paquet sous le bras, la maîtresse lui donna ses clefs pour qu’elle allât quérir la grande bourse tricotée où l’on serrait l’argent du ménage.