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victoire la rouge.

s’en allait, lui coulait de la poitrine avec comme un bonheur de cet épanchement. Sa rude écorce, encore endurcie par le contact terrible de la vie, s’amollissait soudain, attendrie et sensibilisée ; et la sensation qu’elle éprouvait là, pour la seule fois de ses jours, lui amenait un bouleversement dans lequel son cerveau s’exaltait. En cette minute unique, elle eut la compréhension rapide mais claire de tout un côté de la vie qui lui était fermé. Quelque chose jaillissait de son cœur qui l’éblouit. Et dans cette sorte d’éblouissement moral qui lui donnait comme une lucidité somnambulique, elle vit plus loin que sa pensée habituelle : elle aperçut sa vie, ses fautes, sa grossièreté, ses besoins indomptés, elle sentit vaguement qu’elle aurait dû ne pas faire le mal. Et elle éprouva du coup comme la secousse d’un remords.

Puis cet éclair, passé devant son cerveau dans une crise d’exaltation, s’évanouit, et