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victoire la rouge.

sur la terre sèche, lourdement. Sa fourche à l’épaule, sa paillole sur le nez, les jupes courtes, on la voyait passer, courageuse, et on lui criait du bord des prés en fauche :

— Hé ! la fille, c’est demain pour chez nous, pas vrai ?

— Oui bien, répondait la Victoire.

Et elle s’en allait ainsi d’un pré à un autre tous les jours, gagnant ses quinze sous.

Le matin, on faisait l’étalée. On s’attaquait aux berges. L’herbe, encore verdie, s’affalait molle et mouillée de la nuit. Il fallait l’enlever à pleine fourchée et la jeter de çà, de là, en la secouant. Ensuite, on l’écartait encore, du bout de la fourche, pour faire passer l’air et le soleil. Et quand c’était fini, on revenait retournant le foin, déjà sec par-dessus, et qui commençait à sentir sa bonne odeur de foin coupé.

À chaque rangée, les autres faneuses s’arrêtaient, appuyées sur leurs fourches piquées