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victoire la rouge.

demeurée un soir dans quelque fossé profond, se laissant mourir. Mais elle éprouvait comme une faim qui venait de tout son être vigoureux et musclé, au sang vif sous la peau blanche de la fille aux dents saines, aux yeux roux, aux cheveux ardents. Il y avait des heures où elle oubliait tout quand elle s’affalait sur la table d’auberge, l’estomac plein, coude à coude avec des travailleurs suant la fatigue, sentant la terre chaude, et qui la bourraient d’un coup familier dans ses larges flancs. Sa face se rosait, sa bouche rouge s’ouvrait, sensuelle, avide ; elle aspirait ce fumet de chair et de travail, toute la gourmandise de son être se délectait dans une grande joie bestiale de la vie.