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victoire la rouge.

de qui les garçons venaient déjà faire la veillée.

Il en vint deux ce soir-là, et on leur exhiba Victoire. Elle amusa tout le monde. C’était très drôle, les réponses qu’elle leur faisait, en chimaillant, sur ce qu’elle savait, ce qu’elle faisait avant, et d’où elle venait. Cela ne ressemblait à rien de ce que disent et pensent les autres filles de son âge. Le bon Dieu avait tout fait, elle comme le reste ; elle ne connaissait que le bon Dieu : c’était son père et la Sainte Vierge sa mère. Elle n’aimait rien, personne ne l’aimait. Elle ne comprenait même pas bien ce que ça voulait dire.

— Mais tu aimes bien la soupe ? lui dit le père Jameau en éclatant de rire, car il faisait allusion à la graisse qui la boursouflait.

Elle rougit et baissa la tête sans répondre. C’était là son grand péché, et on l’avait deviné tout de suite : elle était gourmande.