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victoire la rouge.

la tenait sans qu’elle sût contre qui, sinon contre la vie elle-même qui l’avait faite si misérable et abandonnée, avec des appétits de brute, qu’elle se gardait cependant d’assouvir, et qui, pour une fois qu’elle s’y abandonnait, sans savoir encore, la jetait à la honte, la livrait aux injures, la chassait hors des foyers honnêtes où son ventre maudit portait le déshonneur.

Dans ces heures de colère et d’effroi, où elle se tenait accroupie, tassée et comme acculée à la haie qui la cachait, semblable à une bête énorme, avec son poil fauve qui lui tombait sur les yeux, et ses mamelles lourdes, et ses mains crispées sur la terre comme des griffes sanglantes au bout d’un bras roide et roux, guettant pour n’être pas surprise, — quelquefois passait au loin, vers la coudée des prés, quelque vache lente et rêveuse, broutillant, la tête retournée vers le petit blond et tendre, qui la suivait en